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Kéniéba: comment un agent public laisse polluer l’environnement ?

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Le 15 mai dernier, les ministres de l’Environnement, des Mines, de la Sécurité et de l’Administration territoriale ont signé un Arrêté Interministériel demandant la suspension des activités des dragues sur les eaux maliennes durant une année. Malgré cet Arrêté, les dragues opèrent dans le cercle de Kéniéba, notamment dans la commune de Dabia. Dabia est une commune rurale située à 28 km de kilomètres de Kéniéba. Elle est traversée par beaucoup de cours d’eau dont le fleuve Falémé. Et c’est sur ce fleuve que les orpailleurs mènent par dragues leurs opérations. Constatant les effets très nuisibles des dragues sur les eaux, le gouvernement sénégalais a interdit l’exploitation aurifère par dragues sur l’ensemble de son territoire. Une décision qui a été scrupuleusement respectée. Certains maires laxistes sénégalais ont même eu des ennuis judiciaires pour n’avoir pas pu mettre fin à la pratique dans leurs communes. Face à la pollution avancée des eaux, 5 ministères maliens ont exigé la suspension des dragues sur toutes les eaux maliennes. Les populations ont accueilli avec joie cette décision. Des opérations de contrôle d’envergure ont suivi l’Arrêté. Des dizaines de dragues seront ainsi prises par les gendarmeries de Bamako et de Koulikoro. Mais à Kayes, les activités par dragues n’ont jamais été suspendues sur le fleuve Falemé, dans la commune de Dabia, notamment dans les villages de Mancouké, de Mamoudouya et d’Hamdallaye. Chinois, Mossis du Burkina, Sénégalais, Guinéens et quelques Maliens s’y pavanent avec leurs dragues sans crainte, au grand dam des populations. Ces orpailleurs par drague sont intouchables à cause de la complicité des services techniques et des autorités administratives et coutumières. Dans l’Arrêté interministériel, il était demandé aux gouverneurs de région, aux préfets, aux sous-préfets, aux maires et aux services techniques compétents d’exécuter cette décision. Le chef de l’exécutif régional, lors d’une conférence de presse, avait d’ailleurs souligné que toutes les dragues étaient désormais à l’arrêt dans sa région. Avait-il été trompé par le préfet de Kéniéba ou le chef du service d’assainissement ou s’agissait-il d’une simple opération de communication ? Car le mal est toujours là. La préfecture et la sous-préfecture de Kéniéba ayant à leur disposition des forces de l’ordre, elles devaient, en principe, être capables d’arrêter l’illégalité. Mais il n’en est rien. À la direction régionale de l’assainissement et des nuisances de Kayes, le Directeur avait affirmé que les dragues étaient à l’arrêt à Kayes. Lorsque nous lui avons cité certains villages où opéraient encore ces engins, le Directeur, M. Bah, appela immédiatement son représentant à Kéniéba. Ce dernier, dans un premier temps, laisse entendre que les dragues n’opèrent plus.

Lorsque le Directeur cite nommément les villages concernés, son représentant de Kéniéba admet finalement que les dragues y opèrent. Selon nos informations recueillies auprès des habitants, cet agent du service de l’assainissement à Kéniéba est la source même du problème. Il rend fréquemment visite à ces dragueurs, non pas pour leur demander d’arrêter le travail, mais pour leur soutirer de l’argent afin de les laisser polluer l’environnement qu’il est censé protéger. Généralement accompagné par les forces de l’ordre, M. Guindo, c’est son nom, a pour habitude de punir les orpailleurs par dragues qui ne parviennent pas à payer la dîme en enlevant les compresseurs de leurs machines. A Chaque visite sur le terrain, il retourne les poches pleines. Mange-t-il seul toutes ces sommes pendant que la nature se meurt ?

Selon les propriétaires des vergers se trouvant au bord des cours d’eau, les arbres qui sont arrosés par l’eau du fleuve meurent car l’eau est inondée de produits toxiques. L’eau n’est plus buvable par les populations et elle tue aussi les poissons. Cette dégradation de la qualité de l’eau a occasionné le déplacement d’un hameau vers un autre site et la disparition entière d’un marigot qui était riche en poissons et en crocodiles. La semaine dernière, des cadavres d’ânes et de bœufs ont été aperçus non loin des cours d’eau dans la commune de Sadiola et de Dabia. Ce sont les produits toxiques qui ont occasionné leur mort.

 

Oumar Bagayogo

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